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< Retour aux actualitésPierre Oteiza, le Basque volant
SUCCÈS - Cette figure du Salon de l'agriculture vend sa production de jambons, saucisses et saucissons basques en France et dans le monde entier.
S'il est bien une figure du Salon de l'agriculture, c'est Pierre Oteiza. Avec son béret basque, on le voit de loin. Le stand où il vend sa productionde jambons, saucisses, saucissons, chorizos ne désemplit pas pendant neuf jours. Mais c'est surtout derrière sa boutique que l'ambiance vaut le détour. Un bar-restaurant où l'on peut déguster les produits au son de l'accordéon et des chants locaux. Un lieu incontournable où s'arrêtent souvent les présidents de la République, de Jacques Chirac à François Hollande - qui devrait sans doute faire une halte cette année -, en passant par Nicolas Sarkozy ou la plupart des ministres de l'Agriculture. « La maison, etchea en basque, doit toujours être ouverte, indique Pierre. Nous avons accueilli Jean Glavany alors qu'il était ministre de l'Agriculture à 2 heures du matin. »
Pour des raisons de sécurité, Pierre Oteiza doit désormais fermer à 20 heures. Il aurait pu demander une autorisation exceptionnelle, lui qui a eu, l'an dernier, la visite surprise d'un Manuel Valls, encore ministre de l'Intérieur, qui a montré un bel appétit. « Il a pris une salade de gésiers, du confit de canard accompagné de haricots blancs, du fromage et enfin du gâteau basque, le tout arrosé d'un vin rouge, l'Irouleguy », se souvient Rose, une cousine de Pierre Oteiza, responsable des boutiques.
Cette année, cela sera sa quarantième participation au Salon de l'agriculture. « Je suis venu pour la première fois au salon en 1976 sur le stand de la maison Petricorena, charcutier traiteur spécialiste de la salaison à Saint-Etienne-de-Baïgorry, àproximité de la ferme familiale », précise-t-il. Outre son métier de charcutier, qu'il a appris dès l'âge de 15 ans chez un oncle à Paris, Pierre est aussi agriculteur. Il a dû reprendre précipitamment, à 20 ans, la petite exploitation d'une quinzaine d'hectares à la suite d'un infarctus de son père. « Il y avait 120 brebis, 6 vaches blondes des Pyrénées, 24 poules, 10 lapins et aussi 10 porcsblancs », détaille-t-il.
Une fabuleuse épopée
Une taille pas assez grande pour nourrir une famille de cinq personnes. En 1987, Pierre et sa femme, Catherine, décident donc de monter leur entreprise pour commercialiser eux-mêmes leurs produits. « Si nous avions trop réfléchi, nous ne l'aurions pas fait. Nous avions les poches vides, heureusement un banquier nous a finalement fait confiance », déclare Pierre Oteiza, dont la vie sera changée après une rencontre fortuite, au salon, en 1989. « Claude Texier, en charge de l'Institut technique du porc, m'a fait découvrir une race que je ne connaissais pas, un comble pour un éleveur du pays : le porc basque kintoa rose et noir. Après le salon, je suis allé récupérer tous les dix-sept porcelets encore répertoriés dans les fermes à droite et à gauche ainsi que trois adultes. L'année suivante, je venais pour la première fois en tant qu'agriculteur exposant de porcs basques. » II les installe non loin de sa boutique dans un enclos avec une meule traditionnelle faites de fougères où ils peuvent s'abriter. De quoi attirer un peu plus l'attention des badauds.
Commence alors une fabuleuse épopée. « De 1992 à 1996, j'ai proposé gratuitement à la dégustation au salon nos propres produits pour les faire connaître au public. Il y avait une queue si impressionnante devant le stand que les années suivantes j'ai décidé de les vendre», affirme-t-il. Maintenant, la ferme familiale est devenue une belle entreprise que les banquiers respectent. Celle-ci avoisine les 8 millions d'euros de chiffre d'affaires pour 60 salariés. Son secret : elle élève 400 porcs qui se nourrissent d'herbe, de farine d'orge, de pois, mais aussi de châtaignes et de glands quand c'est la saison. Une alimentation qui donne un tout autre goût à la viande. Le succès dépasse les frontières. « Depuis six ans, nous exportons nos produits. Cela a commencé par le Japon, l'Australie, la Chine, le Canada et depuis la semaine dernière Taiwan, bientôt les Etats-Unis », indique Pierre Oteiza, qui souhaite réaliser 20 % de son chiffre d'affaires à l'international contre 16 % aujourd'hui.
Pierre Oteiza investit. Il a ouvert dix boutiques dont deux à Paris, à la Madeleine et à Saint-Michel, où l'on trouve bien sûr le jambon du kintoa, mais aussi ses autres spécialités (pâté de porc basque, saucisson des Aldudes...). Il a aussi monté une sécherie en association avec quatre autres artisans éleveurs soucieux, comme lui, de qualité. Ils peuvent y stocker jusqu'à 45 000 jambons. Après seize mois d'affinage (le double d'un jambon de Bayonne traditionnel), le résultat est là avec un goût persillé et fruité.
Sa femme, Catherine, reste au pays veiller sur l'entreprise. Elle concocte des pâtés, rillettes, plats cuisines en boîte, que l'on retrouve dans les boutiques. La relève de Pierre Oteiza, 60 ans, est assurée. Sa fille Céline travaille au service qualité et rédige aussi les recettes de cuisine sur Internet. Son fils, Franchoa, étudiant, s'apprête aussi à travailler en famille. Seule sa cadette, Sophie, est infirmière, comme sa mère à ses débuts. Enfin, supporteur de rugby comme tout bon Basque, Pierre Oteiza organise aujourd'hui un buffet au Stade de France à l'occasion d'un match du Tournoi des six nations.