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Foire au jambon
Le concours du meilleur jambon de Bayonne a ouvert quatre jours de fête. c'est André Pierry, d'Espelette, qui l'a emporté avec un pièce de 22 kilos.
Le jambon fermier s'apprécie à l'horaire paysan. A 8 heures pétantes, jeudi, les 29 pièces soumises aux juges du concours du meilleur jambon étaient déjà alignées depuis longtemps. Le long du carreau des Halles, en ouverture de la Foire dédiée au mets d'ici, l'heure est grave autant que matinale.
Les jurés se présentent, dans la fébrilité générale, drapés dans leurs tabliers noirs, bérets ajustés. Surtout munis de leur outil de vérité : la pique pour sonder les jambons. "Elle est en os de cheval, taillée dans le fémur. Ou en bois de buis. Parce que ça ne prend pas le goût, c'est neutre pour l'odeur", explique le charcutier Christian Montauzer. Cart l'évalution se fait au nez, ici l'inverse du "pifomètre".
Japon de Bayonne
Le hasard ne guide pas plus le point de pique. Les jurés plantent leur poinçon spécial "là, vous voyez, en haut du jarret et sur le côté de l'os du fémur".
"22 kg qu'il fait mon jambon. Et quand ont l'a tué, le 14 décembre 2009, il en faisait 30 ! oui!"
Par un phénomène que les spécialistes savent lié à la pénétration du sel, cette zone ne ment pas quand on hume la pique fraîchement extraite. "Sentez. Alors ? C'est aigre comme odeur, vous voyez. Ce n'est pas bon." Jambon recalé. Il ne reçoit pas le tampon qui adoube les "bayonnables". Soit ceux propres à la vente, précieusement reconnus par les nez fins du concours.
Ce n'est pas qu'un affaire de nez. Mais aussi de toucher et de regard. "On juge la coupe, s'il n'y a pas d'entaille, une coupe de couteau malheureux qui fait entrer l'humidité. On regarde s'il est bien séché, bien salé. Et aussi l'épaisseur du gras." Divin gras. N'en déplaise aux cochons qui ne savent pas ce qui est bon : "c'est le gras qui fait le goût."
Il est 8h30, encore tôt sur l'échelle du journaliste moyen. Mais déjà, la foule des curieux croît autour de l'examen charcutier. Un public international. La preuve avec Shinichi Watanabe, touriste japonais qui ne perd pas un photo de l'événement. L'ami Shinichi ne fait pas de sushis, il est de la partie: "moi aussi, je suis charcutier", contie-t-il. Bon, convenons que l'anglais du sud-ouest de la France et celui des environs de Tokyo sont deux langues étrangères.
22 kilos
Shinishi Watanabe n'est pas seul à photographier les cuissots. Celui-ci cause "avé l'accent", un vrai label rouge: "ça me fait des souvenires. On ne vas pas les manger, mais on dit bien dévorer des yeux." Jean Pierre Dessay, lui va en croquer. Il fait le tour des concurrents, observe. Il consulte les jurés en aparté, qui le connaissent. Depuis le temps... "je viens tous les ans, raconte le gourmet. Chaque année, j'achète un des jambons parmi les finalistes du concours, ça me fait toute l'année, et je suis sûr de ce que j'achète."
Peut-être pas celui d'André Pierry. Une pièce magnifique, l'orgueil du retraité d'Espelette, "ancien de la fonderie de Mousserolles" : "22 kilos, qu'i fait mon jambon. Et quand on l'a tué, le 14 décembre 2009, il en faisait 30 kg !" Une truie de deux ans, 320 kilos. C'est la première fois qu'il participe au concours. "J'ai eu l'idée en découpant. Je me suis dit "celui-là, il peut aller à Bayonne".
Grand bien lui en a pris. Un jambon de concours. Et au final un premiers prix. Vainqueur par KO. "C'est le premier que l'on a évalué, glisse Christian Montauzer, et il a fait la course en tête." André Pierry peut bomber le torse, avec sa cuisse.